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29 octobre 2021
28 octobre 2021
Lucien Fohrer fait citoyen d'honneur de la Ville de Colmar
Lucien Fohrer en pèlerin. Pour ses multiples actions au service d'autrui, il vient d'être fait citoyen d'honneur de la Ville de Colmar.
Voir également
Présidentielle 2022 : Le pass sanitaire ne sera pas obligatoire pour les meetings
« La participation de tous les citoyens à la vie politique de la Nation est l’un des principes fondateurs de notre République. »
Et si on remplaçait "politique" par culturelle, sportive, associative, culinaire, bistrotière...
Nous retrouverions une vie normale pour tous, une Nation.
Dans un courrier envoyé le 28 septembre « aux présidents des principaux partis politiques et aux présidents des groupes au parlement » et consulté par l’AFP, Gérald Darmanin a indiqué que le pass sanitaire n’était « pas exigé des participants » aux réunions politiques.
Le Conseil constitutionnel avait tranché
« La participation de tous les citoyens à la vie politique de la Nation est l’un des principes fondateurs de notre République », écrit le ministre, avant d’ajouter : « Je souhaite néanmoins souligner la responsabilité des organisateurs dans la mise en place et le respect des autres mesures sanitaires permettant de limiter la diffusion du virus ».
Gérald Darmanin
Et si on remplaçait "politique" par culturelle, sportive, associative, culinaire, bistrotière...
Nous retrouverions une vie normale pour tous, une Nation.
MLRM
Le pass sanitaire ne sera pas obligatoire pour assister aux meetings et réunions politiques pendant la campagne présidentielle, a appris vendredi l’AFP auprès de l’entourage du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.
Dans un courrier envoyé le 28 septembre « aux présidents des principaux partis politiques et aux présidents des groupes au parlement » et consulté par l’AFP, Gérald Darmanin a indiqué que le pass sanitaire n’était « pas exigé des participants » aux réunions politiques.
Le Conseil constitutionnel avait tranché
« La participation de tous les citoyens à la vie politique de la Nation est l’un des principes fondateurs de notre République », écrit le ministre, avant d’ajouter : « Je souhaite néanmoins souligner la responsabilité des organisateurs dans la mise en place et le respect des autres mesures sanitaires permettant de limiter la diffusion du virus ».
Selon le courrier, le ministère de l’Intérieur suit l’avis du Conseil constitutionnel du 31 mai, qui avait indiqué que les réunions politiques n’entraient pas dans le champ des grands rassemblements de personnes où les participants doivent disposer du pass sanitaire. Cette semaine, l’Assemblée nationale a donné un premier feu vert au projet de loi « vigilance sanitaire », avec la possibilité de recourir au pass sanitaire jusqu’au 31 juillet 2022.
27 octobre 2021
Les Bains municipaux de Strasbourg
Michel Spitz
Inaugurés en 1908, les Bains municipaux de Strasbourg de Fritz Beblo, architecte-urbaniste de la Ville de Strasbourg (1872-1947) ont vu passer des générations entières dans leurs bassins. Ils comprennent deux bâtiments conçus :
- l’un, à des fins curatives : un bâtiment thermal construit entre 1904 et 1911 (piscines, bains romains…)
- l’autre, à des fins de loisirs : un bâtiment médicinal construit entre 1908 et 1911 (hydrothérapie, luminothérapie, inhalations, bains de boue, de sel ou de soufre).
Le premier établissement, restauré et modernisé conserve l'esprit d'origine. Il va rouvrir ses portes au public après deux ans de rénovation. Ce joyau architectural de la Neustadt, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, est lui aussi classé monument historique. La rénovation, menée par Eiffage, a été conçue par les cabinets Chatillon Architectes et TNA architectes. Le site, propriété de la Ville, sera exploité en délégation de service publique par la société Equalia.
Inaugurés en 1908, les Bains municipaux de Strasbourg de Fritz Beblo, architecte-urbaniste de la Ville de Strasbourg (1872-1947) ont vu passer des générations entières dans leurs bassins. Ils comprennent deux bâtiments conçus :
- l’un, à des fins curatives : un bâtiment thermal construit entre 1904 et 1911 (piscines, bains romains…)
- l’autre, à des fins de loisirs : un bâtiment médicinal construit entre 1908 et 1911 (hydrothérapie, luminothérapie, inhalations, bains de boue, de sel ou de soufre).
Le premier établissement, restauré et modernisé conserve l'esprit d'origine. Il va rouvrir ses portes au public après deux ans de rénovation. Ce joyau architectural de la Neustadt, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, est lui aussi classé monument historique. La rénovation, menée par Eiffage, a été conçue par les cabinets Chatillon Architectes et TNA architectes. Le site, propriété de la Ville, sera exploité en délégation de service publique par la société Equalia.
Photos © Michel Spitz
Présidentielle 2022
Michel Naudo
Je suis effaré d'entendre Michel Barnier déclarer qu'il aurait été plus simple de supprimer la TVA sur le gaz et l'électricité plutôt que de recourir à un "chèque inflation". Tout le monde sait qu'en politique et particulièrement en période électorale, les propositions simplistes foisonnent. S'agissant de l'Union Européenne, nous sommes habitués à entendre des discours accusant l'UE de tous les maux alors même que les décisions ou les directives en cause, sont prises par les Etats membres eux-mêmes, en accord avec le Parlement européen.
Entendre un ancien commissaire européen comme Barnier, parfaitement au fait du droit européen et qui de plus s'est illustré brillamment en conduisant les négociations du Brexit, se vautrer de la sorte avec des déclarations dignes d'un Zemmour, c'est tout simplement affligeant. Certes, il faut qu'il donne des gages aux militants LR qui ne brillent pas particulièrement par un engagement pro-européen mais tout de même !
Rappelez-vous simplement le mal qu'avait eu Nicolas Sarkozy pour faire baisser le taux de TVA dans la restauration et des mois de négociation qui avaient été nécessaires pour y arriver, face en particulier aux réticences d'Angela Merkel...
L'UE (donc les Etats membres) ayant acté le fait qu'il fallait une harmonisation des taux de TVA dans l'UE (art 99 du TCE), il est extrêmement complexe et délicat d'y toucher car la plupart du temps il faut que la proposition émane de la Commission (à la demande d'un Etat par exemple) puis un accord unanime des Etats membres est nécessaire. C'est tout sauf simple et immédiat. Les politiques regagneront en crédibilité quand ils arrêteront de prendre les électeurs pour des billes en leur racontant des histoires qui ne correspondent pas à la réalité...
Je suis effaré d'entendre Michel Barnier déclarer qu'il aurait été plus simple de supprimer la TVA sur le gaz et l'électricité plutôt que de recourir à un "chèque inflation". Tout le monde sait qu'en politique et particulièrement en période électorale, les propositions simplistes foisonnent. S'agissant de l'Union Européenne, nous sommes habitués à entendre des discours accusant l'UE de tous les maux alors même que les décisions ou les directives en cause, sont prises par les Etats membres eux-mêmes, en accord avec le Parlement européen.
Entendre un ancien commissaire européen comme Barnier, parfaitement au fait du droit européen et qui de plus s'est illustré brillamment en conduisant les négociations du Brexit, se vautrer de la sorte avec des déclarations dignes d'un Zemmour, c'est tout simplement affligeant. Certes, il faut qu'il donne des gages aux militants LR qui ne brillent pas particulièrement par un engagement pro-européen mais tout de même !
Rappelez-vous simplement le mal qu'avait eu Nicolas Sarkozy pour faire baisser le taux de TVA dans la restauration et des mois de négociation qui avaient été nécessaires pour y arriver, face en particulier aux réticences d'Angela Merkel...
L'UE (donc les Etats membres) ayant acté le fait qu'il fallait une harmonisation des taux de TVA dans l'UE (art 99 du TCE), il est extrêmement complexe et délicat d'y toucher car la plupart du temps il faut que la proposition émane de la Commission (à la demande d'un Etat par exemple) puis un accord unanime des Etats membres est nécessaire. C'est tout sauf simple et immédiat. Les politiques regagneront en crédibilité quand ils arrêteront de prendre les électeurs pour des billes en leur racontant des histoires qui ne correspondent pas à la réalité...
26 octobre 2021
Didier van Cauwelaert
L'ECRIVAIN, LES COURGETTES ET LE PASS SANITAIRE
Niché au cœur d’un village des Bouches-du-Rhône, c’est l’un des salons du livre que je préfère. Il a été créé en 1990 à Fuveau sous l’égide d’Edmonde Charles-Roux par un passionné, Jean Bonfillon. Aujourd’hui, sa veuve Christiane et une trentaine de bénévoles continuent d’animer avec la même ardeur Les Écrivains en Provence, rendez-vous festif que le succès n’a jamais dénaturé.
Nous dédicaçons sous les platanes, en haut du boulevard Loubet où se tient le marché des producteurs locaux, et cette union géographique des maraîchers, des artisans et des auteurs stimule autant la gourmandise que l’envie de lire et d’échanger.
Cette année, après une demi-douzaine de décrets contradictoires, la préfecture a exempté du pass sanitaire les acheteurs de courgettes, de charcuterie, de miel et d’objets d’art pour l’imposer aux seuls amateurs de livres. Dans le strict respect de leur interprétation de la loi, les bourreaucrates ont ainsi exigé qu’on grillage l’espace littéraire, afin de l’isoler de la manifestation « normale », matérialisant de fait une sorte de zoo dans lequel un public trié par QR code aurait seul accès aux gens de plume, cette espèce dangereuse hautement contaminante, à leurs yeux, de par la présumée résistance du variant culturel aux mesures discriminatoires. Dans ce camp retranché d’auteurs et de lecteurs « sanitairement corrects » bagués bleu ciel façon volaille, on imagine la mine des écrivains algériens, invités d’honneur cette année, qui étaient venus au pied de la Sainte-Victoire célébrer la liberté d’expression.
Difficile de se rappeler dans un tel contexte que, le 17 juin dernier, notre chef de l’État a érigé la lecture en « grande cause nationale 2021 ». Ce n’est pourtant pas sous le patronage d’Alfred Jarry et de son Ubu roi que cet édit culturel était placé, mais sous celui de Fabrice Luchini et des Fables de La Fontaine – ce génial visionnaire des Animaux malades de la peste, qui nous raconte comment Sa Majesté le Lion, dans le but d’éradiquer une épidémie, réunit le parlement animal pour choisir une victime expiatoire. Ce fut, ne l’oublions pas, le mouton. « Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blancs ou noirs. »
Quoi qu’il en soit, nous étions bien contents, nous les fournisseurs de la grande cause nationale. Quelques mois plus tôt, le livre était encore qualifié de « non essentiel », prohibé dans les librairies closes comme dans les hypermarchés bondés, où des rubans de scène de crime en empêchaient l’approche – outrage à la littérature qui avait scandalisé toute l’Europe, et dont nous avions obtenu réparation par nos soutiens aux libraires, nos coups de gueule et nos articles incendiaires. Une page bien noire venait d’être tournée.
Et voilà que ça recommence. Mais, cette fois, le milieu culturel baisse les bras, dans l’espoir de conserver l’autorisation d’accueillir le public. Les enfermistes auraient gagné ? Pour nous « épargner » le reconfinement, ils ont imposé le tri sélectif. En nous piégeant dans nos contradictions, nos concessions, nos élans de révolte cassés par le moutonnage ambiant, ils pensent avoir eu le dernier mot.
Que faire ? Boycotter les salons du livre en privant les organisateurs, le public et nous-mêmes de ces moments d’échange si précieux ? Nous censurer au nom des libertés foulées aux pieds, par solidarité envers les professions bien plus pénalisées que nous, et nous faire ainsi traiter de brebis galeuses, de covido-sceptiques, de crypto-complotistes par les hystériques appointés des plateaux télé ? Nous sommes un certain nombre d’auteurs à nous poser ce dilemme, à chercher une solution qui ménage notre honneur, nos principes et nos scrupules. En ce qui me concerne, j’avais promis à Christiane Bonfillon que je viendrais, bien avant l’instauration du sauf-conduit médical lors de la conférence présidentielle au Grand-Palais éphémère, et j’ai tenu ma promesse.
Résultat : gros succès du marché alimentaire, mais embouteillages dissuasifs aux contrôles d’accès à la littérature, déception et agacement général aboutissant à une forte baisse de la fréquentation, pour la première fois dans l’histoire de ce festival toujours pris d’assaut. Mission accomplie pour les bourreaucrates : il suffit d’entraver l’accès à la culture pour démontrer, par la diminution artificielle de la demande, qu’il s’agit bel et bien d’une activité « non essentielle » aux yeux de la population.
Quittant quelques minutes mon stand sous surveillance policière pour aller flâner dans la zone libre du marché des producteurs, je croise une famille atterrée qui m’aborde, chargée de sacs. « On voulait vous faire signer nos livres, mais il paraît qu’on n’a pas le droit : on est venus sans pass. » M’asseyant alors sur un ballot de paille, adossé à une charrette décorative, j’entreprends de dédicacer les trente ans d’intimité que je partage à mon insu avec ces trois générations de lecteurs – les plus beaux moments de la vie publique d’un auteur, ceux qui justifient tant de mois de labeur solitaire, de doute et d’obstination silencieux, d’exclusion volontaire pour aller au fond de soi retrouver le sens de la vie et le goût des autres.
Et voilà qu’une dizaine de curieux s’approchent, que des liens se créent, que des astuces jaillissent. Une dame au vigoureux accent provençal lance à une amie : « Hé, toi, la cuèrcodée, tu ne veux pas aller m’acheter un bouquin du monsieur, comme ça, il me le signe ici ? » Je souscris, ravi. La voilà, la solution ! La signature « hors-les-murs », entre les courgettes, les saucissons et les tapenades. Mon nouveau statut : réfugié culturel au milieu des étals de bouffe. On accroche à la charrette derrière moi une pancarte aux accents magrittiens : « Ceci n’est pas un écrivain, mais un producteur d’histoires », et le tour est joué.
La meilleure façon de contourner une loi discriminatoire pour aider à son abrogation, c’est parfois de la respecter au pied de la lettre. Rappelons-nous comment Jacques Offenbach, en 1857, a vaincu par l’humour une censure grotesque lui défendant de faire chanter plus de quatre personnages en même temps sur une scène. Son ouvrage Croquefer en comporte un cinquième. Au lieu de le supprimer pour éviter l’interdiction du spectacle, le compositeur imagine que l’infortuné surnuméraire a eu la langue coupée dans un combat, ce qui le contraint à présenter son texte au public sur de grands panneaux, tandis que ses camarades de jeu chantent sa partition à la troisième personne. L’hilarité dans laquelle une telle provocation plonge le public, des spectateurs les plus modestes jusqu’à l’empereur Napoléon III, aura raison de cette mesure de restriction débile. Et le ministre qui l’avait imposée, Charles de Morny, deviendra sous pseudonyme un des librettistes d’Offenbach.
Voilà où nous en sommes arrivés, aujourd’hui : aller puiser dans un régime impérial, issu d’un coup d’État, un exemple de liberté restituée après confiscation. Mais bon, nous ne sommes pas pour autant, comme l’affirment quelques centaines de milliers d’excédés, en dictature sanitaire. « Allez voir ce qui se passe en Corée du Nord », leur ont répliqué les intraitables hygiénistes qui nous gouvernent – défense assez maladroite, avouons-le, ramenant la définition de la dictature à une question de degré et non de nature. Mais une chose est certaine : les croque-morts, les pète-sec et les pisse-froid qui nous empoisonnent la vie pour nous protéger du mal ont oublié – ou refusent d’admettre – que le rire est l’un des meilleurs moyens de renforcer nos défenses immunitaires. Le rire qui désamorce la peur, le stress, la dépression, la soumission.
« On ne plaisante pas avec la santé ! » ripostent les covidolâtres accrochés à leur nouveau credo. Un peu de patience, messieurs les censeurs. Lorsque, de dose en dose, de nouvelles vagues en variants résistants, le citoyen se sera habitué à commander sa piquouse hebdomadaire à la « Pfizéria » du coin, c’est qu’il aura été vacciné de surcroît, dans son intérêt et celui des autres, contre cet humour dangereux pour l’immunité de l’État.
L'ECRIVAIN, LES COURGETTES ET LE PASS SANITAIRE
Niché au cœur d’un village des Bouches-du-Rhône, c’est l’un des salons du livre que je préfère. Il a été créé en 1990 à Fuveau sous l’égide d’Edmonde Charles-Roux par un passionné, Jean Bonfillon. Aujourd’hui, sa veuve Christiane et une trentaine de bénévoles continuent d’animer avec la même ardeur Les Écrivains en Provence, rendez-vous festif que le succès n’a jamais dénaturé.
Nous dédicaçons sous les platanes, en haut du boulevard Loubet où se tient le marché des producteurs locaux, et cette union géographique des maraîchers, des artisans et des auteurs stimule autant la gourmandise que l’envie de lire et d’échanger.
Cette année, après une demi-douzaine de décrets contradictoires, la préfecture a exempté du pass sanitaire les acheteurs de courgettes, de charcuterie, de miel et d’objets d’art pour l’imposer aux seuls amateurs de livres. Dans le strict respect de leur interprétation de la loi, les bourreaucrates ont ainsi exigé qu’on grillage l’espace littéraire, afin de l’isoler de la manifestation « normale », matérialisant de fait une sorte de zoo dans lequel un public trié par QR code aurait seul accès aux gens de plume, cette espèce dangereuse hautement contaminante, à leurs yeux, de par la présumée résistance du variant culturel aux mesures discriminatoires. Dans ce camp retranché d’auteurs et de lecteurs « sanitairement corrects » bagués bleu ciel façon volaille, on imagine la mine des écrivains algériens, invités d’honneur cette année, qui étaient venus au pied de la Sainte-Victoire célébrer la liberté d’expression.
Difficile de se rappeler dans un tel contexte que, le 17 juin dernier, notre chef de l’État a érigé la lecture en « grande cause nationale 2021 ». Ce n’est pourtant pas sous le patronage d’Alfred Jarry et de son Ubu roi que cet édit culturel était placé, mais sous celui de Fabrice Luchini et des Fables de La Fontaine – ce génial visionnaire des Animaux malades de la peste, qui nous raconte comment Sa Majesté le Lion, dans le but d’éradiquer une épidémie, réunit le parlement animal pour choisir une victime expiatoire. Ce fut, ne l’oublions pas, le mouton. « Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blancs ou noirs. »
Quoi qu’il en soit, nous étions bien contents, nous les fournisseurs de la grande cause nationale. Quelques mois plus tôt, le livre était encore qualifié de « non essentiel », prohibé dans les librairies closes comme dans les hypermarchés bondés, où des rubans de scène de crime en empêchaient l’approche – outrage à la littérature qui avait scandalisé toute l’Europe, et dont nous avions obtenu réparation par nos soutiens aux libraires, nos coups de gueule et nos articles incendiaires. Une page bien noire venait d’être tournée.
Et voilà que ça recommence. Mais, cette fois, le milieu culturel baisse les bras, dans l’espoir de conserver l’autorisation d’accueillir le public. Les enfermistes auraient gagné ? Pour nous « épargner » le reconfinement, ils ont imposé le tri sélectif. En nous piégeant dans nos contradictions, nos concessions, nos élans de révolte cassés par le moutonnage ambiant, ils pensent avoir eu le dernier mot.
Que faire ? Boycotter les salons du livre en privant les organisateurs, le public et nous-mêmes de ces moments d’échange si précieux ? Nous censurer au nom des libertés foulées aux pieds, par solidarité envers les professions bien plus pénalisées que nous, et nous faire ainsi traiter de brebis galeuses, de covido-sceptiques, de crypto-complotistes par les hystériques appointés des plateaux télé ? Nous sommes un certain nombre d’auteurs à nous poser ce dilemme, à chercher une solution qui ménage notre honneur, nos principes et nos scrupules. En ce qui me concerne, j’avais promis à Christiane Bonfillon que je viendrais, bien avant l’instauration du sauf-conduit médical lors de la conférence présidentielle au Grand-Palais éphémère, et j’ai tenu ma promesse.
Résultat : gros succès du marché alimentaire, mais embouteillages dissuasifs aux contrôles d’accès à la littérature, déception et agacement général aboutissant à une forte baisse de la fréquentation, pour la première fois dans l’histoire de ce festival toujours pris d’assaut. Mission accomplie pour les bourreaucrates : il suffit d’entraver l’accès à la culture pour démontrer, par la diminution artificielle de la demande, qu’il s’agit bel et bien d’une activité « non essentielle » aux yeux de la population.
Quittant quelques minutes mon stand sous surveillance policière pour aller flâner dans la zone libre du marché des producteurs, je croise une famille atterrée qui m’aborde, chargée de sacs. « On voulait vous faire signer nos livres, mais il paraît qu’on n’a pas le droit : on est venus sans pass. » M’asseyant alors sur un ballot de paille, adossé à une charrette décorative, j’entreprends de dédicacer les trente ans d’intimité que je partage à mon insu avec ces trois générations de lecteurs – les plus beaux moments de la vie publique d’un auteur, ceux qui justifient tant de mois de labeur solitaire, de doute et d’obstination silencieux, d’exclusion volontaire pour aller au fond de soi retrouver le sens de la vie et le goût des autres.
Et voilà qu’une dizaine de curieux s’approchent, que des liens se créent, que des astuces jaillissent. Une dame au vigoureux accent provençal lance à une amie : « Hé, toi, la cuèrcodée, tu ne veux pas aller m’acheter un bouquin du monsieur, comme ça, il me le signe ici ? » Je souscris, ravi. La voilà, la solution ! La signature « hors-les-murs », entre les courgettes, les saucissons et les tapenades. Mon nouveau statut : réfugié culturel au milieu des étals de bouffe. On accroche à la charrette derrière moi une pancarte aux accents magrittiens : « Ceci n’est pas un écrivain, mais un producteur d’histoires », et le tour est joué.
La meilleure façon de contourner une loi discriminatoire pour aider à son abrogation, c’est parfois de la respecter au pied de la lettre. Rappelons-nous comment Jacques Offenbach, en 1857, a vaincu par l’humour une censure grotesque lui défendant de faire chanter plus de quatre personnages en même temps sur une scène. Son ouvrage Croquefer en comporte un cinquième. Au lieu de le supprimer pour éviter l’interdiction du spectacle, le compositeur imagine que l’infortuné surnuméraire a eu la langue coupée dans un combat, ce qui le contraint à présenter son texte au public sur de grands panneaux, tandis que ses camarades de jeu chantent sa partition à la troisième personne. L’hilarité dans laquelle une telle provocation plonge le public, des spectateurs les plus modestes jusqu’à l’empereur Napoléon III, aura raison de cette mesure de restriction débile. Et le ministre qui l’avait imposée, Charles de Morny, deviendra sous pseudonyme un des librettistes d’Offenbach.
Voilà où nous en sommes arrivés, aujourd’hui : aller puiser dans un régime impérial, issu d’un coup d’État, un exemple de liberté restituée après confiscation. Mais bon, nous ne sommes pas pour autant, comme l’affirment quelques centaines de milliers d’excédés, en dictature sanitaire. « Allez voir ce qui se passe en Corée du Nord », leur ont répliqué les intraitables hygiénistes qui nous gouvernent – défense assez maladroite, avouons-le, ramenant la définition de la dictature à une question de degré et non de nature. Mais une chose est certaine : les croque-morts, les pète-sec et les pisse-froid qui nous empoisonnent la vie pour nous protéger du mal ont oublié – ou refusent d’admettre – que le rire est l’un des meilleurs moyens de renforcer nos défenses immunitaires. Le rire qui désamorce la peur, le stress, la dépression, la soumission.
« On ne plaisante pas avec la santé ! » ripostent les covidolâtres accrochés à leur nouveau credo. Un peu de patience, messieurs les censeurs. Lorsque, de dose en dose, de nouvelles vagues en variants résistants, le citoyen se sera habitué à commander sa piquouse hebdomadaire à la « Pfizéria » du coin, c’est qu’il aura été vacciné de surcroît, dans son intérêt et celui des autres, contre cet humour dangereux pour l’immunité de l’État.
Hervé Kempf (Reporterre)
Édito — Politique
Le rôle de l’extrême droite : faire oublier la crise écologique
L’attraction de M. Zemmour suscitée par les médias oligarchiques détourne l’attention des problèmes urgents de la crise écologique. La fonction de la haine contre l’islam et les migrants ? Maintenir le système actuel de privilèges. Au risque d’entrer dans une spirale incontrôlable de violence et de chaos.
Un voyageur persan en serait ébahi : comment le pays qui s’est longtemps glorifié d’être la « patrie des droits de l’Homme » peut-il glisser avec une délectation morbide vers une forme moderne de fascisme ? Comment un histrion de plateaux télé, plusieurs fois condamné pour provocation à la discrimination raciale et à la haine religieuse, peut-il se retrouver en position d’imaginer accéder à la présidence de la République ? Comment un milliardaire habile, héritier d’une fortune bâtie sur l’exploitation coloniale et coupable de corruption en Afrique, a-t-il pu donner une audience inespérée à M. Zemmour, à travers les médias qu’il avale avec un appétit d’ogre pour les transformer en relais de propagande d’extrême droite ? Pourquoi les autres médias des oligarques rabâchent-ils à longueur de colonnes et d’antennes les thèmes de l’insécurité, de l’islam, de l’identité, par la voix de journalistes serviles ?
Le voyageur informé de l’état du monde ne serait pas moins éberlué de l’ignorance qu’affecte cette clique hurlante à l’égard du problème urgent qu’affronte l’humanité en ce début de XXIe siècle : la catastrophe écologique, documentée par d’innombrables rapports scientifiques comme par l’expérience que vivent des dizaines de millions de victimes des inondations, feux de forêt, sécheresses, événements qui se répètent à une allure accélérée d’année en année. Mais les médias des oligarques, partis de droite, d’extrême droite et d’extrême centre continuent à agir et à s’agiter comme s’il ne s’agissait que d’un problème périphérique, auquel la merveilleuse énergie nucléaire saurait répondre magiquement. Fait significatif : dans leur vie même, les dominants se sentent si invulnérables qu’ils achètent à coups de millions des villas dans des zones appelées à être submergées durant les prochaines décennies.
Le secret de cette dissonance cognitive massive tient en un misérable petit secret : la cupidité — ou plutôt l’amour du « seul dieu moderne auquel on ait foi, l’Argent dans toute sa puissance », selon l’expression de Balzac. Les riches, puisqu’il faut les appeler par leur nom, tiennent à préserver par-dessus tout leur situation privilégiée. Celle-ci est étroitement corrélée avec leur impact écologique, comme vient de le montrer la nouvelle étude du World Inequality Lab qui montre que le groupe des 1 % les plus riches de la planète émettent 16,8 % des émissions de gaz carbonique, plus que les 50 % du bas de l’échelle des revenus !
À la conséquence logique qu’entraîne ce constat — il faut diminuer drastiquement la prodigalité des ultra-riches —, ceux-ci opposent une réponse butée : non ! Et divertissent l’opinion publique par tous les puissants moyens d’influence dont ils disposent, en agitant le spectre d’une invasion de migrants ou en assurant que les miracles technologiques résoudront l’épineux problème écologique qu’on ne peut tout à fait dissimuler. Les deux positions ne sont d’ailleurs pas opposées, mais se mêlent dans des proportions différentes selon la place que l’on entend assurer dans l’éventail idéologique du capitalisme autoritaire.
Pendant que le réchauffement climatique se poursuit à une cadence que rien ne semble pouvoir infléchir, comme l’indique le rapport de l’Organisation météorologique mondiale publié ce jour, « l’industrie de la sécurité » trouve ainsi dans les dispositifs anti-migrants un nouveau relais de sa croissance ininterrompue. Plus globalement, les pays riches dépensent bien plus pour renforcer leurs frontières contre les migrants, que pour aider les pays pauvres d’où ils viennent à affronter la crise climatique. Cette politique et l’excitation raciste qu’entretient une large partie de l’oligarchie ne peuvent que conduire à un avenir de plus en plus violent et chaotique.
On ne peut que le répéter : face à cette évolution mortifère, seule une politique fermement engagée dans l’écologie, dans la prise en compte de l’urgence climatique, de la sobriété, de la décroissance ouvre la voie d’un avenir pacifique et épanouissant. C’est à la faire fleurir que, modestement, mais tenacement, Reporterre œuvre jour après jour. Et qu’à court terme, dans les trois semaines qui s’ouvrent, nous raconterons la conférence des Nations unies sur le climat, dite COP26, qui se déroulera à Glasgow à partir du 1er novembre. Ces grandes conférences internationales sont souvent décevantes et semblent parfois inutiles. Elles ont cependant le mérite de rappeler que l’humanité est une, malgré ses divisions, et affronte un problème commun. De quoi se purger des replis identitaires et moroses.
Édito — Politique
Le rôle de l’extrême droite : faire oublier la crise écologique
L’attraction de M. Zemmour suscitée par les médias oligarchiques détourne l’attention des problèmes urgents de la crise écologique. La fonction de la haine contre l’islam et les migrants ? Maintenir le système actuel de privilèges. Au risque d’entrer dans une spirale incontrôlable de violence et de chaos.
Un voyageur persan en serait ébahi : comment le pays qui s’est longtemps glorifié d’être la « patrie des droits de l’Homme » peut-il glisser avec une délectation morbide vers une forme moderne de fascisme ? Comment un histrion de plateaux télé, plusieurs fois condamné pour provocation à la discrimination raciale et à la haine religieuse, peut-il se retrouver en position d’imaginer accéder à la présidence de la République ? Comment un milliardaire habile, héritier d’une fortune bâtie sur l’exploitation coloniale et coupable de corruption en Afrique, a-t-il pu donner une audience inespérée à M. Zemmour, à travers les médias qu’il avale avec un appétit d’ogre pour les transformer en relais de propagande d’extrême droite ? Pourquoi les autres médias des oligarques rabâchent-ils à longueur de colonnes et d’antennes les thèmes de l’insécurité, de l’islam, de l’identité, par la voix de journalistes serviles ?
Le voyageur informé de l’état du monde ne serait pas moins éberlué de l’ignorance qu’affecte cette clique hurlante à l’égard du problème urgent qu’affronte l’humanité en ce début de XXIe siècle : la catastrophe écologique, documentée par d’innombrables rapports scientifiques comme par l’expérience que vivent des dizaines de millions de victimes des inondations, feux de forêt, sécheresses, événements qui se répètent à une allure accélérée d’année en année. Mais les médias des oligarques, partis de droite, d’extrême droite et d’extrême centre continuent à agir et à s’agiter comme s’il ne s’agissait que d’un problème périphérique, auquel la merveilleuse énergie nucléaire saurait répondre magiquement. Fait significatif : dans leur vie même, les dominants se sentent si invulnérables qu’ils achètent à coups de millions des villas dans des zones appelées à être submergées durant les prochaines décennies.
Le secret de cette dissonance cognitive massive tient en un misérable petit secret : la cupidité — ou plutôt l’amour du « seul dieu moderne auquel on ait foi, l’Argent dans toute sa puissance », selon l’expression de Balzac. Les riches, puisqu’il faut les appeler par leur nom, tiennent à préserver par-dessus tout leur situation privilégiée. Celle-ci est étroitement corrélée avec leur impact écologique, comme vient de le montrer la nouvelle étude du World Inequality Lab qui montre que le groupe des 1 % les plus riches de la planète émettent 16,8 % des émissions de gaz carbonique, plus que les 50 % du bas de l’échelle des revenus !
À la conséquence logique qu’entraîne ce constat — il faut diminuer drastiquement la prodigalité des ultra-riches —, ceux-ci opposent une réponse butée : non ! Et divertissent l’opinion publique par tous les puissants moyens d’influence dont ils disposent, en agitant le spectre d’une invasion de migrants ou en assurant que les miracles technologiques résoudront l’épineux problème écologique qu’on ne peut tout à fait dissimuler. Les deux positions ne sont d’ailleurs pas opposées, mais se mêlent dans des proportions différentes selon la place que l’on entend assurer dans l’éventail idéologique du capitalisme autoritaire.
Pendant que le réchauffement climatique se poursuit à une cadence que rien ne semble pouvoir infléchir, comme l’indique le rapport de l’Organisation météorologique mondiale publié ce jour, « l’industrie de la sécurité » trouve ainsi dans les dispositifs anti-migrants un nouveau relais de sa croissance ininterrompue. Plus globalement, les pays riches dépensent bien plus pour renforcer leurs frontières contre les migrants, que pour aider les pays pauvres d’où ils viennent à affronter la crise climatique. Cette politique et l’excitation raciste qu’entretient une large partie de l’oligarchie ne peuvent que conduire à un avenir de plus en plus violent et chaotique.
On ne peut que le répéter : face à cette évolution mortifère, seule une politique fermement engagée dans l’écologie, dans la prise en compte de l’urgence climatique, de la sobriété, de la décroissance ouvre la voie d’un avenir pacifique et épanouissant. C’est à la faire fleurir que, modestement, mais tenacement, Reporterre œuvre jour après jour. Et qu’à court terme, dans les trois semaines qui s’ouvrent, nous raconterons la conférence des Nations unies sur le climat, dite COP26, qui se déroulera à Glasgow à partir du 1er novembre. Ces grandes conférences internationales sont souvent décevantes et semblent parfois inutiles. Elles ont cependant le mérite de rappeler que l’humanité est une, malgré ses divisions, et affronte un problème commun. De quoi se purger des replis identitaires et moroses.
25 octobre 2021
Alain Eschenlauer à l'Espace Malraux
Michel Spitz
Après des mois de privation, Alain Eschenlauer présente dans cette exposition le résultat de ses réflexions introspectives, pour la plupart réalisées pendant le confinement. Patiemment, avec application, il prend le temps de dessiner à l’encre, de poser avec attention des ensembles d’aplats de couleurs, comme des apparitions de vie au fond de boîtes de pétri. Alain Eschenlauer invite le visiteur à se questionner sur le monde, un monde tendant plus à être subi que vécu. Son travail renvoie, à la fois par le traitement mais aussi par le choix des sujets, à une imagerie connotée dans le temps, celle des encyclopédies, des cabinets de curiosité, ou encore des collections naturalistes de la fin du XVIIIème siècle.
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