Jeanne Sénéchal
Le Figaro - 26/02/2021
Les professeurs devront-ils effectuer des tests salivaires sur leurs élèves ?
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Un élève fournit un échantillon à l'école Louise Bourgeois à Paris le 11 février 2021. STEPHANE DE SAKUTIN / AFP |
Une «notice pour l'organisation du recueil salivaire», à l'intention d'un directeur d'école, a été publiée sur les réseaux. Elle prévoit notamment que le personnel enseignant sera formé à «la supervision de tests» sur les élèves. Qu'en est-il vraiment ?
Tandis que la campagne de tests salivaires a été lancée dans les écoles de la zone A, certains professeurs s'inquiètent quant à sa mise en application. Cette semaine, le directeur d'un établissement a reçu une « notice pour l'organisation du recueil salivaire ». Cette dernière prévoit notamment la formation de son personnel dans le but de superviser ces tests. Suite à cette publication, professeurs et syndicats se sont mobilisés sur les réseaux sociaux : seront-ils vraiment amenés à effectuer des prélèvements sur leurs élèves ? Le Figaro fait le point.
Sur la note en question, nous pouvons effectivement lire que les prélèvements seront effectués « par le personnel de l'école, doté d'équipement de protection individuel », au préalable formé par le personnel de laboratoire et accompagné « autant que possible » par une « infirmière scolaire ».
Cette directive est rapidement remontée entre les mains du SNUipp, premier syndicat du premier degré. Contactée par Le Figaro, Guislaine David, sa porte-parole, explique qu'il est impossible pour les enseignants d'effectuer ces tests. « Imaginez, sur une classe de 28 élèves, 8 n'ont pas l'autorisation de se faire tester. Comment voulez-vous qu'un professeur quitte sa classe pour aller s'équiper, faire passer les tests. Qui va s'occuper des 8 enfants restants ? » interpelle-t-elle. Au-delà de cette situation, le simple fait d'effectuer les tests est compliqué. « Prenons l'exemple d'une sortie scolaire. Il y a toujours des encadrants de prévus (parents ou professeurs). L'enseignant ne peut pas être seul à gérer. »
Le ministère de l'Éducation nationale affirme au Figaro qu' « il n'a jamais été question qu'un professeur d'école teste ses élèves ». Il justifie ce couac par un souci de communication. « Les enseignants seront effectivement formés pour superviser, mais ce sont le personnel de santé de l'éducation nationale ou les secours en renfort qui effectueront ces tests. »
« On va encore jouer sur la corde sensible et la culpabilisation des enseignants »
[Guislaine David, porte-parole du SNUipp, premier syndicat du premier degré]
Pourtant, d'après la porte-parole du syndicat, le cabinet de Jean-Michel Blanquer aurait confirmé la première information. « Les professeurs seront peut-être amenés à les effectuer, mais jamais obligés. » « Il va y avoir une pression sur les professeurs », s'inquiète la porte-parole. « À la fois de l'institution, des parents. Les professeurs vont se sentir obligés de faire passer les tests, et ils vont le faire pour la sécurité de tout le monde. »
Guislaine David s'indigne : « Cela fait six mois qu'on demande d'effectuer ces tests, un mois qu'on a l'autorisation, et aucun cadre national n'a été organisé. » Pour elle, « le ministère ne sait pas comment cela se passe réellement sur le terrain » : « on n'a pas l'effectif nécessaire, les infirmières et médecins scolaires sont déjà très occupés. On va encore jouer sur la corde sensible et sur la culpabilisation des enseignants. »
Souci d'information ou manque d'organisation, pour le moment, dans les faits, aucun professeur n'a effectué de test sur ses élèves depuis lundi. Face à l'ambition de tester 300.000 enfants par semaine, comme l'a annoncé Jean-Michel Blanquer, la porte-parole du syndicat et les professeurs restent perplexes.
https://www.lefigaro.fr/actualite-france/les-professeurs-devront-ils-effectuer-des-tests-salivaires-sur-leurs-eleves-20210226