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17 mai 2020

Phil

DNA Colmar : Déchetteries, le monde d'après ?..



Ariane Mnouchkine à Télérama

“Je ressens de la colère devant la médiocrité, les mensonges et l’arrogance de nos dirigeants”

Réclusion des aînés, mensonges, infantilisation… Ariane Mnouchkine ne cache pas son indignation face aux couacs du pouvoir. Et la directrice du Théâtre du Soleil milite pour que l’art vivant, essentiel à la société, ne soit pas oublié.
Propos recueillis par Joëlle Gayot
Publié le 09/05/2020.

EXTRAITS

« J’ai du chagrin. Car derrière les chiffres qu’un type égrène chaque soir à la télévision, en se félicitant de l’action formidable du gouvernement, je ne peux m’empêcher d’imaginer la souffrance et la solitude dans lesquelles sont morts ces femmes et ces hommes. La souffrance et l’incompréhension de ceux qui les aimaient, à qui on a interdit les manifestations de tendresse et d’amour, et les rites, quels qu’ils soient, indispensables au deuil. Indispensables à toute civilisation. Alors qu’un peu d’écoute, de respect, de compassion de la part des dirigeants et de leurs moliéresques conseillers scientifiques aurait permis d’atténuer ces réglementations émises à la hâte, dont certaines sont compréhensibles mais appliquées avec une rigidité et un aveuglement sidérants. »

« Je ressens de la colère, une terrible colère et, j’ajouterai, de l’humiliation en tant que citoyenne française devant la médiocrité, l’autocélébration permanente, les mensonges désinformateurs et l’arrogance obstinée de nos dirigeants. Pendant une partie du confinement, j’étais plongée dans une semi-inconscience due à la maladie. Au réveil, j’ai fait la bêtise de regarder les représentants-perroquets du gouvernement sur les médias tout aussi perroquets. J’avais respecté la rapidité de réaction d’Emmanuel Macron sur le plan économique et son fameux « quoi qu’il en coûte » pour éviter les licenciements. Mais lorsque, dans mon petit monde convalescent, sont entrés en piste ceux que je surnomme les quatre clowns, le directeur de la Santé, le ministre de la Santé, la porte-parole du gouvernement, avec, en prime, le père Fouettard en chef, le ministre de l’Intérieur, la rage m’a prise. Je voudrais ne plus jamais les revoir. »

« En nous répétant, soir après soir, contre tout bon sens, que les masques étaient inutiles voire dangereux, ils nous ont, soir après soir, désinformés et, littéralement, désarmés. Alors qu’il eût fallu, et cela dès que l’épidémie était déclarée en Chine, suivre l’exemple de la plupart des pays asiatiques et nous appeler à porter systématiquement le masque, quitte, puisqu’il n’y en avait pas, à en fabriquer nous-mêmes. Or nous avons dû subir les mensonges réitérés des quatre clowns, dont les propos inoubliables de la porte-parole du gouvernement qui nous a expliqué que, puisque elle-même — la prétention de cet « elle-même » — ne savait pas les utiliser, alors personne n’y parviendrait ! Selon de nombreux médecins qui le savent depuis longtemps mais dont la parole ne passait pas dans les médias-perroquets au début de la catastrophe, nous allons tous devoir nous éduquer aux masques car nous aurons à les porter plusieurs fois dans notre vie. Je dis cela car dans le clip qui nous recommande les gestes barrières, le masque ne figure toujours pas. Je suis de celles et ceux qui pensent que son usage systématique, dès les premières alertes, aurait, au minimum, raccourci le confinement mortifère que nous subissons. »

« J’entends s’exprimer dans les médias des obsédés anti-vieux, qui affirment qu’il faut tous nous enfermer, nous, les vieux, les obèses, les diabétiques jusqu’en février, sinon, disent-ils, ces gens-là encombreront les hôpitaux. Ces gens-là ? Est-ce ainsi qu’on parle de vieilles personnes et de malades ? Les hôpitaux ne seraient donc faits que pour les gens productifs en bonne santé ? Donc, dans la France de 2020, nous devrions travailler jusqu’à 65 ans et une fois cet âge révolu, nous n’aurions plus le droit d’aller à l’hôpital pour ne pas encombrer les couloirs ? Si ce n’est pas un projet préfasciste ou prénazi, ça y ressemble. »


Texte intégral (réservé aux abonnés)
cliquer ici ↴
https://www.telerama.fr/scenes/ariane-mnouchkine-je-ressens-de-la-colere-devant-la-mediocrite,-les-mensonges-et-larrogance-de-nos,n6636739.php


Photo Richard Dumas

14 mai 2020

Luc Martin

Chers amies et amis,

Je viens d’entendre à la TV France-Info (le 13 mai) une nouvelle de la plus haute importance : nos 40 Académiciens, de l'Académie française, se sont réunis en urgence pour décider que l’on devrait dorénavant dire LA Covid et non LE Covid. C'est leur contribution à cette crise.
Pourquoi ? Parce que le « d » de Covid doit être traduit en français par LA maladie. Vous n'avez pas compris ? Moi non plus, mais passons.
Heureusement que l’Académie française nous rappelle à l’ordre ; il lui faut bien justifier, de temps en temps, les immenses avantages dont bénéficient ses membres, qui, notons-le, sont régulièrement dénoncés par une Cour des Comptes sans pouvoir d’exécution.

Qu'importe, le rôle de l'Académie française est essentiel dans la sauvegarde de la langue française ! Qu'elle se dépêche aussi de rappeler aux journalistes pourquoi il faut qu'ils disent « la cluster » et non le « le cluster », puisque ce mot, je viens de l'apprendre (en questionnant la Croix), signifie « la grappe » (Le saviez-vous ?) Ne lui demandez pas, ni aux journalistes non plus, le rapport entre « cluster » et « foyer de contamination », expression déjà d'un autre temps.

C'est vrai ! Si l’anglais voulait bien donner un genre à tous les noms, la vie serait plus simple pour nous, pauvres Français déjà pas très doués pour les langues étrangères.
Si nos Académiciens délaissaient un peu leurs travaux sur le dictionnaire de la langue française, pour inviter tous ces preneurs de paroles (médias, politiques, publicistes... essentiellement parisiens) à parler un français juste, concis et surtout clair, et sans fautes grossières, et sans le remplacer sans cesse par des anglicismes, bref à réapprendre le français à ces gens-là, nous applaudirions fort, nous, les provinciaux ignares, et finalement nous pourrions fermer les yeux sur leurs immenses privilèges.

De tout cœur, à vous.

Luc Martin

11 mai 2020

STATIONNEMENT À COLMAR

L'inventaire des silos à voitures à Colmar est PRODIGIEUX !Ils sont au nombre de 6 pour un total cumulé de plus de 4000 places...
Quelle ville de 70.000 habitants peut se targuer d'une telle pléthore de bunkers bétonnés ?
Avec la trêve à durée indéterminée dans le tourisme de masse, voire même du tourisme tout court, nos finances publiques seront à la fête ! Et d'ailleurs, pourquoi ne pas décider de freiner sérieusement ce tourisme de masse tant décrié ?
De surcroît, les orientations futures préconisant davantage l'utilisation du vélo et des transports en communs étant inévitables, qu'allons-nous faire de tous ces mètres carrés et mètres cubes ?
Et donc, pourquoi ne pas décider que les places de parking ainsi libérées seront « bradées » pour les Colmariens, ce qui permettra de libérer de l'espace pour des pistes cyclables en lieu et place du stationnement sur la voirie !
Voilà une idée à rajouter au programme du candidat Straumann !
DR

Phil



10 mai 2020

Les Musicales de Colmar 2020

Michel Spitz

C’est avec une grande tristesse que nous nous voyons contraints d’annuler les Musicales de Colmar 2020.
Sans surprise, cette édition dédiée à Beethoven n’aura pas lieu.

Nous remercions de tout cœur tous les précieux soutiens qui ne nous font pas défaut dans la tempête et qui nous permettent de résister en imaginant un avenir, même si celui-ci sera nécessairement différent : la Ville de Colmar, la Région Grand-Est, le Conseil Départemental du Haut-Rhin, la DRAC Grand-Est, la Ville de Breisach et tous nos partenaires privés.

Malgré les incertitudes et si la possibilité nous en est donnée, nous voulons imaginer un événement musical à l’automne, pour Colmar et pour les habitants de la région, au cœur de cette Alsace si cruellement éprouvée par la pandémie.

Parce que nous croyons que rien ne saurait remplacer le concert vivant, nous souhaitons que la musique et les musiciens soient présents pour aider à panser les plaies, rendre hommage aux victimes, remercier comme ils le méritent les soignants et tous ceux qui permettent à la vie de suivre son cours.
Nous voudrions offrir des concerts en milieu hospitalier et distribuer la recette des concerts que nous donnerons dans nos lieux habituels aux associations qui viennent en aide à ceux qui sont le plus durement touchés par la crise que nous traversons.

Nous ne manquerons pas de vous tenir au courant de nos projets et ferons tout ce qui est en notre capacité pour vous offrir au plus vite de véritables concerts.

Marc Coppey, Directeur artistique
Michel Spitz, Président

6 mai 2020

« Le monde après le coronavirus sera le même, en un peu pire. »

Lettre de Michel Houellebecq à France Inter


Michel Houellebecq - DPA/ABACA


Il faut bien l’avouer : la plupart des mails échangés ces dernières semaines avaient pour premier objectif de vérifier que l’interlocuteur n’était pas mort, ni en passe de l’être. Mais, cette vérification faite, on essayait quand même de dire des choses intéressantes, ce qui n’était pas facile, parce que cette épidémie réussissait la prouesse d’être à la fois angoissante et ennuyeuse. Un virus banal, apparenté de manière peu prestigieuse à d’obscurs virus grippaux, aux conditions de survie mal connues, aux caractéristiques floues, tantôt bénin tantôt mortel, même pas sexuellement transmissible : en somme, un virus sans qualités. Cette épidémie avait beau faire quelques milliers de morts tous les jours dans le monde, elle n’en produisait pas moins la curieuse impression d’être un non-événement. D’ailleurs, mes estimables confrères (certains, quand même, sont estimables) n’en parlaient pas tellement, ils préféraient aborder la question du confinement ; et j’aimerais ici ajouter ma contribution à certaines de leurs observations. Frédéric Beigbeder (de Guéthary, Pyrénées-Atlantiques). Un écrivain de toute façon ça ne voit pas grand monde, ça vit en ermite avec ses livres, le confinement ne change pas grand-chose. Tout à fait d’accord, Frédéric, question vie sociale ça ne change à peu près rien. Seulement, il y a un point que tu oublies de considérer (sans doute parce que, vivant à la campagne, tu es moins victime de l’interdit) : un écrivain, ça a besoin de marcher. Ce confinement me paraît l’occasion idéale de trancher une vieille querelle Flaubert-Nietzsche. Quelque part (j’ai oublié où), Flaubert affirme qu’on ne pense et n’écrit bien qu’assis. Protestations et moqueries de Nietzsche (j’ai également oublié où), qui va jusqu’à le traiter de nihiliste (ça se passe donc à l’époque où il avait déjà commencé à employer le mot à tort et à travers) : lui-même a conçu tous ses ouvrages en marchant, tout ce qui n’est pas conçu dans la marche est nul, d’ailleurs il a toujours été un danseur dionysiaque, etc. Peu suspect de sympathie exagérée pour Nietzsche, je dois cependant reconnaître qu’en l’occurrence, c’est plutôt lui qui a raison. Essayer d’écrire si l’on n’a pas la possibilité, dans la journée, de se livrer à plusieurs heures de marche à un rythme soutenu, est fortement à déconseiller : la tension nerveuse accumulée ne parvient pas à se dissoudre, les pensées et les images continuent de tourner douloureusement dans la pauvre tête de l’auteur, qui devient rapidement irritable, voire fou.

La seule chose qui compte vraiment est le rythme mécanique, machinal de la marche, qui n’a pas pour première raison d’être de faire apparaître des idées neuves (encore que cela puisse, dans un second temps, se produire), mais de calmer les conflits induits par le choc des idées nées à la table de travail (et c’est là que Flaubert n’a pas absolument tort) ; quand il nous parle de ses conceptions élaborées sur les pentes rocheuses de l’arrière-pays niçois, dans les prairies de l’Engadine etc., Nietzsche divague un peu : sauf lorsqu’on écrit un guide touristique, les paysages traversés ont moins d’importance que le paysage intérieur. Catherine Millet (normalement plutôt parisienne, mais se trouvant par chance à Estagel, Pyrénées-Orientales, au moment où l’ordre d’immobilisation est tombé). La situation présente lui fait fâcheusement penser à la partie « anticipation » d’un de mes livres, La possibilité d’une île. Alors là je me suis dit que c’était bien, quand même, d’avoir des lecteurs. Parce que je n’avais pas pensé à faire le rapprochement, alors que c’est tout à fait limpide. D’ailleurs, si j’y repense, c’est exactement ce que j’avais en tête à l’époque, concernant l’extinction de l’humanité. Rien d’un film à grand spectacle. Quelque chose d’assez morne. Des individus vivant isolés dans leurs cellules, sans contact physique avec leurs semblables, juste quelques échanges par ordinateur, allant décroissant.Emmanuel Carrère (Paris-Royan ; il semble avoir trouvé un motif valable pour se déplacer). Des livres intéressants naîtront-ils, inspirés par cette période ? Il se le demande. Je me le demande aussi. Je me suis vraiment posé la question, mais au fond je ne crois pas. Sur la peste on a eu beaucoup de choses, au fil des siècles, la peste a beaucoup intéressé les écrivains. Là, j’ai des doutes. Déjà, je ne crois pas une demi-seconde aux déclarations du genre « rien ne sera plus jamais comme avant ». Au contraire, tout restera exactement pareil. Le déroulement de cette épidémie est même remarquablement normal. L’Occident n’est pas pour l’éternité, de droit divin, la zone la plus riche et la plus développée du monde ; c’est fini, tout ça, depuis quelque temps déjà, ça n’a rien d’un scoop. Si on examine, même, dans le détail, la France s’en sort un peu mieux que l’Espagne et que l’Italie, mais moins bien que l’Allemagne ; là non plus, ça n’a rien d’une grosse surprise.

Le coronavirus, au contraire, devrait avoir pour principal résultat d’accélérer certaines mutations en cours. Depuis pas mal d’années, l’ensemble des évolutions technologiques, qu’elles soient mineures (la vidéo à la demande, le paiement sans contact) ou majeures (le télétravail, les achats par Internet, les réseaux sociaux) ont eu pour principale conséquence (pour principal objectif ?) de diminuer les contacts matériels, et surtout humains. L’épidémie de coronavirus offre une magnifique raison d’être à cette tendance lourde : une certaine obsolescence qui semble frapper les relations humaines. Ce qui me fait penser à une comparaison lumineuse que j’ai relevée dans un texte anti-PMA rédigé par un groupe d’activistes appelés « Les chimpanzés du futur » (j’ai découvert ces gens sur Internet ; je n’ai jamais dit qu’Internet n’avait que des inconvénients). Donc, je les cite :
« D’ici peu, faire des enfants soi-même, gratuitement et au hasard, semblera aussi incongru que de faire de l’auto-stop sans plateforme web. »
Le covoiturage, la colocation, on a les utopies qu’on mérite, enfin passons. Il serait tout aussi faux d’affirmer que nous avons redécouvert le tragique, la mort, la finitude, etc.

La tendance depuis plus d’un demi-siècle maintenant, bien décrite par Philippe Ariès, aura été de dissimuler la mort, autant que possible ; eh bien, jamais la mort n’aura été aussi discrète qu’en ces dernières semaines. Les gens meurent seuls dans leurs chambres d’hôpital ou d’EHPAD, on les enterre aussitôt (ou on les incinère ? l’incinération est davantage dans l’esprit du temps), sans convier personne, en secret. Morts sans qu’on en ait le moindre témoignage, les victimes se résument à une unité dans la statistique des morts quotidiennes, et l’angoisse qui se répand dans la population à mesure que le total augmente a quelque chose d’étrangement abstrait. Un autre chiffre aura pris beaucoup d’importance en ces semaines, celui de l’âge des malades. Jusqu’à quand convient-il de les réanimer et de les soigner ? 70, 75, 80 ans ? Cela dépend, apparemment, de la région du monde où l’on vit ; mais jamais en tout cas on n’avait exprimé avec une aussi tranquille impudeur le fait que la vie de tous n’a pas la même valeur ; qu’à partir d’un certain âge (70, 75, 80 ans ?), c’est un peu comme si l’on était déjà mort. Toutes ces tendances, je l’ai dit, existaient déjà avant le coronavirus ; elles n’ont fait que se manifester avec une évidence nouvelle. Nous ne nous réveillerons pas, après le confinement, dans un nouveau monde ; ce sera le même, en un peu pire.


Michel HOUELLEBECQ


Phil
 

Déconfinement en Alsace : J-5


L'après-crise du coronavirus : ils ne lâcheront rien

Frédéric Lordon
Le Monde diplomatique - 5 mai 2020

[...] par quel miracle quoi que ce soit devrait-il changer d’ici cinquante nouvelles années ?

EXTRAITS :

[...] la réponse est très simple : parce qu’il y a « du monde » en face. Certes, un tout petit monde, mais très resserré, très coordonné, et très déterminé — à ne rien changer du tout. Le délié du doigt fourré avec lequel les patrons de Total, de la BNP et de tant d’autres ont envoyé le gouvernement se faire voir chez Plumeau à propos des dividendes de l’année gagnerait, par exemple, être pris en considération — s’il étonne encore quiconque. Voilà ce que ces gens se permettent au cœur de l’épidémie. On imagine « après ».

On aura sans doute — on a déjà — l’occasion de rire beaucoup avec les « contreparties » des aides d’État qui ne manqueront pas de tomber, et bien épaisses. La condition de non-fricotage dans les paradis fiscaux, bien sûr c’était pour rire — elle a d’ailleurs vécu ce que vivent les amendements, l’espace d’un matin. Celle de correction environnementale minimale a dû susciter une hilarité plus grande si c’était possible — et puis quoi encore ?

Cependant, tout bien considéré, Roux de Bézieux, lui, n’est pas de ceux qui ne veulent rien changer : par exemple les 35 heures et les congés payés, il est très partisan du changement, « et que ça saute ! » Tout le monde se la raconte en technicolor avec la démondialisation et la relocalisation des chaînes de valeur. Mais c’est une fable pour enfants en bas âge. Que le gouvernement décide pour l’avenir de s’épargner les humiliations d’aujourd’hui et rapatrie masques, respirateurs plus quelques médicaments, sans doute. Que les entreprises pèsent le risque géopolitique (elles le faisaient déjà) ou, maintenant, géosanitaire là où elles ont leurs billes de sous-traitance, probablement aussi. Mais s’imaginer que le capital sous pouvoir actionnarial renoncera à des coûts salariaux de 100 $ / mois au Vietnam (la Chine, c’est devenu i-na-bor-dable !), et bientôt de 20 $ en Afrique qui piaffe à la porte de la mondialisation, c’est se raconter des histoires en couleurs. Le comble étant bien sûr de se figurer que les nullités criminelles au pouvoir pourraient manifester la moindre velléité de faire changer quoi ce soit. Macron jure qu’il va « se réinventer », ça doit bien être la troisième fois, et célèbre aussitôt sa réinvention en passant un costume trois pièces de banquier et des boutons de manchette nacrés pour nous raconter sa fête « des travailleurs et des travailleuses ».

Ceux qui s’imaginent qu’« après, tout sera différent » doivent croire très fort aux pouvoirs de la fée Clochette. Parce que les tendances spontanément à l’œuvre nous avertissent plutôt que, sauf action de déraillement organisé, « après » sera pareil en pire.

[...] il se passe une vérification. La vérification d’une certaine impossibilité. L’impossibilité, c’est celle opposée par le capital qui, en quarante ans, a tellement conquis, tellement pris l’habitude d’exiger et d’obtenir, tellement régné sans partage, et surtout installé si profondément les structures de son règne –- la financiarisation, le libre-échange, les délocalisations –- qu’il n’existe pas pour lui la moindre raison sérieuse d’abandonner quoi que ce soit. Et en effet : quand on a si méthodiquement installé les conditions de son emprise, par quelle sorte de miracle humaniste renoncerait-on à l’exercer ? Tant la concurrence instituée à l’échelle internationale par l’OMC et l’UE que le primat de la valeur actionnariale imposé dans les marchés de titres déréglementés déterminent les courses successives vers l’Europe centrale, la Chine, le Vietnam, l’Afrique. Les délocalisations ne sont que l’exercice de ces possibilités, la satisfaction joyeuse des impératifs institués de la compétitivité et de la rentabilité. Et aussi la sanction exemplaire des corps sociaux qui refusent de s’ajuster autant qu’il le faudrait. Vous vous accrochez à votre code du travail, à votre SMIC et à votre protection sociale ? Chaque fois que vous résisterez, nous vous briserons un peu plus. Puisque, par les latitudes de mouvement que nous nous sommes aménagées, nous en avons les moyens.

L'article dans son intégralité 

https://blog.mondediplo.net/ils-ne-lacheront-rien