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10 avril 2025

Florian Brunner

-10/4/2025- Depuis quelques semaines, les publications s’enchaînent : la collégiale Saint-Martin, flanquée de ses échafaudages, devient l’emblème d’un mandat qui se prépare à faire son bilan. On pose pour la photo, casque sur la tête, comme la première adjointe, Odile Uhlrich-Mallet.
On parle d’histoire, de pierre, de beauté retrouvée. Et pendant ce temps, un autre chantier, plus discret, plus politique, reste en suspens : celui de la vision pour Colmar. Car il ne suffit pas de restaurer les murs. Encore faut-il savoir ce que l’on veut y abriter.
Avant toute chose, il faut saluer le travail remarquable des artisans et professionnels mobilisés sur ce chantier. Tous œuvrent avec exigence et patience à redonner souffle à un édifice majeur. Leur engagement, leur savoir-faire et leur humilité font honneur à la ville.
La majorité municipale, par la voix de son adjoint aux finances, Olivier Zinck, se félicite aujourd’hui d’un excédent de recettes (+13 % depuis 2019), d’un autofinancement historique (31 millions d’euros), d’une trésorerie à 40 millions, et d’un recours nul à l’emprunt en 2024. On parle d’« opportunités saisies », de « gestion entrepreneuriale », de « vision de long terme ». Pourtant, dans ce discours d’autosatisfaction budgétaire, il manque l’essentiel : à quoi bon tout cela, si c’est pour ne rien transformer ?
Ce que l’on voit, ce sont des chiffres. Ce que l’on ne voit pas, c’est un cap. Colmar mérite mieux qu’un récit de performance comptable. Elle mérite un projet.
18,4 millions d’euros sont prévus pour les travaux de restauration de la collégiale Saint-Martin, qui devront s’achever en 2030. Un chantier certes nécessaire, porté en grande partie par les finances municipales, avec l’appui limité de la DRAC (282 000 €) et de la CEA (1,2 million). Et pourtant, malgré une trésorerie abondante, la Ville lance un appel aux dons auprès des particuliers pour 150 000 euros, renouvelé à chaque phase du chantier. À ce jour, 12 000 euros ont été récoltés, grâce à 34 donateurs.
Il ne s’agit pas de critiquer ceux qui donnent, ni ceux qui restaurent. Il s’agit de poser une question simple : comment expliquer que l’on sollicite les habitants quand on dispose de moyens aussi largement revendiqués ? Et surtout : que dit ce choix de ce qu’est devenue la politique municipale ? Une façade, un chiffre, une stratégie d’image. Pas un souffle.
Restaurer, c’est bien. Mais restaurer sans penser, c’est prolonger l’immobilisme. Comme le rappelle Loïc Jaegert-Huber, Colmar mérite une ville qui pense son avenir, pas seulement son décor.