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5 décembre 2024

Politique spectacle, pitoyable spectacle

Vivien Garnier

- 5/12/2024 - Depuis plusieurs années, la classe politique dans son ensemble offre une mise en scène minable de sa médiocrité. Les motions de censure de ce jour ne forment qu’un énième acte dans cette tragédie aux airs de café-théâtre. C'est Molière au théâtre du Splendid, Spielberg qui réalise les Bidasses en folie.
À droite, pour commencer. Michel Barnier est tombé ce soir. L’abus de 49.3 depuis 2022 aura eu raison de lui, alors qu’il n’en était qu’à son premier. Depuis trois mois, il aura essayé de faire au mieux, pense-t-il, cédant au piège du RN et ne faisant aucune concession à la gauche. Pourtant, quand on est issu d’un parti qui fait 6% aux législatives, on fait en sorte de travailler collégialement. Le RN voulait le briser dès le début, jouant les sirènes à la douce voix pour mieux le noyer. La bande annonce du film était pourtant évidente, même si la sortie, initialement prévue en juillet, aura été repoussée à septembre.
Marine Le Pen, pour éviter une éventuelle inéligibilité justifiée liée au détournement de fonds, met la pression pour provoquer une présidentielle, lui offrant soit la possibilité d’une élection, soit un sursis – encore – pour la suivante. "Au nom des Français", il s’agit surtout de sauver sa peau. Rien d’autre.
La responsabilité, au RN, c’est de sauver la chef et d’installer Jordan Bardella à Matignon, portrait miroir et faux jumeau de Gabriel Attal, version vintage, tout juste bon à faire rougir les adolescentes sur Insta et TikTok. Un garçon de 28 ans, qui ne sait rien de la vie – encore un ! – qui veut nous faire croire qu’il sait mieux que les autres comment redresser le pays. On a déjà donné.
Puis il y a Bruno Retailleau, tapis dans l’ombre, qui attend la chute de Barnier pour s’installer à Matignon. Lui saura avoir la confiance du RN. Du moins le croit-il. Il ne serait pas surprenant que les pourparlers avec l’Elysée aient commencé dès la semaine dernière.
Eric Ciotti, le traître ou le héros, selon comment on se positionne dans cet improbable échiquier, est là, qui boit son petit-lait, trop heureux de savourer la chute des ex-copains et qui se rêve déjà à la place de Retailleau.
"Au nom des Français", il dresse un pitoyable spectacle de leur médiocrité et on repense à cette phrase de Guy Mollet qui disait que la France avait « la droite la plus stupide du monde ».
LR, qui ne gagnera probablement plus jamais aucune élection nationale, a eu une occasion unique de s’offrir un dernier tour de piste aux responsabilités avec l’entrée en scène de Barnier. Mais le rideau risque de tomber.
Au entre ensuite. Emmanuel Macron pour commencer. Il a hissé l’irresponsabilité politique au rang d’art majeur. La dissolution était une connerie monumentale, un caprice de petit garçon mécontent. Un chat sur une étagère qui pousse un pot de fleur. Avant, l’Assemblée était branlante mais il y avait un semblant d’équilibre. Depuis six mois, c’est la chienlit.
Gabriel Attal, au fond, est victime collatérale de cela. On ne pouvait lui enlever cette volonté de bien faire. Et de subir. Et on le pointe comme responsable alors qu’il n’aura été réellement premier ministre que six mois.
Elisabeth Borne, recordwoman ès 49.3, joue Ponce-Pilate alors qu’elle copartage la réalisation de ce mauvais film.
Aussi étrange que cela puisse paraître, le grand argentier des sept dernières années, qui nous a fait croire qu’il était le Mozart de la finance, Bruno Le Maire, ne semble pas comprendre qu’il est responsable des 3000 milliards de déficit. Harpagon de pacotille qui a protégé sa cassette mais pas le trésor, nous sommes 70 millions à craindre le pire, à être incités à se serrer la ceinture. Dans la vraie vie, hors des écrans, le Français lambda, le figurant, fait face à la justice quand il a des dettes. Lui se pensait Louvois, il ne fut que Fouquet. À nous de jouer les Harpagon, alors que notre cassette est vide.
Enfin, à Gauche, où l’on confond lutte des classes et lutte des places. Jean-Luc Mélenchon le fantôme, qui hante les couloirs du Palais Bourbon, qui distribue ses ordres et qui fait peur aux Français, malheureusement pour certains assez stupides pour penser qu’il a encore une influence.
Parmi ses lieutenants, on y trouve Mathilde Panot, Clémence Guetté, Sandrine Rousseau, notre formidable trio de Précieuses Ridicules, vociférantes extasiées qui ne fédèrent pas. Telles des poissonnières sur un marché, elles lancent leurs invectives comme elles vendraient des morues ou des crevettes, croyant détenir la vérité absolue. C’est à babord qu’on gueule le plus fort dit la chanson.
François Hollande est aussi de la partie, comme un vieil acteur sur le retour qui depuis 2012 jouait dans les téléfilms ou les séries en espérant revenir sur grand écran. Il est aussi responsable de cette farce, lorsque son incompétence crasse l’a empêché de se représenter en 2017 et qu’il nous a laissé pour choix en 2017 un obscur énarque et une héritière fachisante. Dans un western, il pensait être le shérif de GaucheTown, il n’est que le croquemort de PS-City.
Puis Oliver Faure, qui a transformé le PS en sous-parti de LFI, un peu comme chez AB Production avec Hélène et les garçons et ses variantes telles Le miel et les abeilles, Premiers baisers…
Et tous, à droite et à gauche, veulent la chute de Barnier et la démission de Macron.
Nous sommes dans l’impasse, dans l’absurde. Le RN pas plus que le NFP se sortiront indemne de ce nanar politique.
Personnellement, je suis mi-blasé mi-furieux. Tous sont responsables de cette situation hallucinante. Nous vivons dans un feuilleton improbable où le scénario est écrit sans songer à la fin.
Les acteurs sont mauvais, les dialogues mal écrits et le scénario mal abouti. Les Français regrettent d’avoir payé leur place lorsqu’ils sont allés voter en juillet dernier.