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Il va devenir difficile de distinguer ce qui fait le charme un peu rude des dictatures orientales de la soyeuse bonté des démocraties occidentales : chaque jour qui passe accroît l’évaporation rapide des principes fondamentaux de nos démocraties et tout indique qu’on se dirige vers un monde où penser de travers vaudra sinon mise à mort physique, au moins mise à mort sociale…
Pour étayer ce constat, on pourrait par exemple jeter un œil au dernier bulletin produit par le Homeland Security, l’administration américaine en charge de la sécurité intérieure du pays, et qui a récemment explicité comment elle entendait lutter contre les menaces terroristes qu’elle voit manifestement partout.
Pour elle, et moyennant un élargissement particulièrement généreux de la définition de « terrorisme », le fait d’émettre de la désinformation participe maintenant des actions terroristes qu’il sera bon de traquer et poursuivre avec la plus grande fermeté. Bien évidemment, il appartiendra à cette administration de juger ce qui relève de la désinformation ou non, cette dernière étant jugée comme néfaste dès lors qu’elle peut engendrer la discorde au sein du peuple.
En somme, penser de travers et faire usage de sa liberté d’expression peut largement rentrer dans ce cadre, et conduire en prison ceux qui s’y prêtent.
On pourrait croire à une exagération, mais malheureusement, les récents événements en France et au Canada forcent à lever tout doute : en France, il est maintenant assez officiellement interdit de se rassembler pacifiquement à Paris pour protester contre les mesures sanitaires ségrégationnistes actuellement en place. La brutalité policière contre la tentative de manifestation dont les Parisiens et la communauté internationale ont été témoins il y a quelques jours ne permettent guère d’interprétation favorable à l’actuel gouvernement Macron-Castex.
Au Canada, l’ampleur de la dérive totalitaire est maintenant visible par tout le monde.
Devant le mouvement de protestation des camionneurs du Convoi de la Liberté qui s’est installé devant le Parlement à Ottawa et qui se traduit par une espèce de fête foraine bon enfant avec force distribution de nourriture, musique et châteaux gonflables pour les enfants, Justin Trudeau, l’actuel Premier ministre canadien, a courageusement décrété un état d’urgence proche d’une loi martiale.
Il fallait au moins ça pour disperser des barbecues et des distributions de sandwiches rythmés par une abominable musique populaire probablement mise trop fort.
Le bilan ne fait cependant pas rire : une fois cette loi d’exception passée, les médias ont très officiellement reçu l’interdiction d’aller sur place témoigner des opérations de police en cours. Certains régimes autocratiques répressifs ne procèdent pas autrement.
Lors de ces opérations, si des animaux domestiques venaient à être séparés policièrement de leurs propriétaires (ce qui est possible pour tous les camionneurs venus avec leur chien par exemple), les autorités ont déjà amplement prévenu qu’une confiscation de l’animal était prévue, le temps que les déboires judiciaires du propriétaire se résolvent. Au bout de 10 jours cependant, si le propriétaire est toujours englué dans les procédures, l’animal est considéré comme perdu et euthanasié. Là encore, certains régimes brutaux ne diraient pas non.
Enfin, et cette nouvelle a quelque peu désarçonné tous ceux qui croyaient encore naïvement aux fables sur les gouvernements responsables devant le peuple, le gouvernement Trudeau entend bloquer les comptes bancaires (et tous les avoirs financiers) des personnes impliquées de près ou de loin avec les mouvements de protestations qui parsèment le Canada. Bien que le droit d’assemblée pacifique ne soit pas remis en cause par les pouvoirs exceptionnels que Trudeau vient d’obtenir, le fait de faire partie d’une telle assemblée signifie donc à présent le gel de tout avoir bancaire, sans jugement ni procès.
Il va sans dire que ce genre de procédé (qui a d’ailleurs posé des problèmes techniques aux banques forcées de s’adapter très rapidement à un processus qui n’était pas vraiment prévu) est parfaitement scandaleux en ce qu’il revient à jeter à la rue, instantanément, tout opposant politique.
L’affaire prend des tournures glaçantes lorsqu’on apprend ainsi que des personnes ont été licenciées pour avoir fait des dons au Convoi de la Liberté, ce qui au passage est la définition même de la dictature et signifie la fin claire de la démocratie canadienne.
Ces pouvoirs exceptionnels auront en outre permis aux policiers d’intervenir sur place : rapidement, ce qui était jusqu’à présent une manifestation pacifique a donc logiquement tourné à une série d’arrestations plus ou moins violentes. Au passage, notons que Trudeau se comporte à l’antithèse d’un président Trump qu’on a vu conserver son calme lors des émeutes Antifa et BLM au cours de l’été 2020 et qui n’a jamais demandé de pouvoir spéciaux pour obtenir le retour au calme. A contrario, Trudeau a non seulement refusé de discuter avec les manifestants pacifiques d’Ottawa, il les a copieusement insultés, et, une fois ces pouvoirs spéciaux (et dictatoriaux) obtenus, il s’est empressé de les utiliser…
De façon plus inquiétante encore, les agissements de Trudeau n’ont été condamnés par aucun chef d’état occidental.
Ce n’est pas un hasard : la plupart d’entre eux (et Macron n’est pas le dernier) a déjà réfléchi à l’opportunité d’utiliser ce genre de pouvoirs avec leur propre population.
Pourquoi ? Probablement parce que la situation actuelle ne sent pas bon, pour le dire gentiment.
Économiquement, tout part en sucette, et les politiciens au pouvoir n’ont plus l’excuse pandémique pour cacher leur responsabilité ; l’inflation galope et tout le monde comprend qu’il s’agit d’une conséquence directe de fermetures de plus en plus arbitraires et stupides de pans entiers de l’économie, de l’« helicopter money » et du « quoi qu’il en coûte », certainement pas à cause des gens qui tombent malade…
Cette situation catastrophique est mondiale notamment car tout le système basé sur des liquidités contrôlées par des banques centrales est lui-même mondial. Tout le monde, peuple et dirigeants inclus, comprend qu’on arrive partout au bout des dettes, des distributions d’argent et des bidouilles créatives sur les marchés.
Or, lorsqu’une situation est mondiale, il n’y a nulle part où aller : les politiciens ne voulant pas être tenus responsables des monceaux d’erreurs qu’ils ont enfilées pour camoufler leur incompétence et leur impéritie, les gabegies qu’ils ont financées à crédit sur les générations futures puis les choix désastreux de politiques de santé destinées à maintenir la population sous contrôle, bref, comme tous veulent fuir leurs responsabilités et qu’ils ne peuvent s’enfuir ou disparaître durablement, il ne leur reste qu’accélérer vers l’autoritarisme le plus pur.
C’est exactement ce qu’on observe actuellement et dans ce contexte, le Canada n’est qu’une étape.
Si les politiciens veulent effectivement accélérer, quelques éléments les retiennent. Oh, bien sûr, il ne s’agit plus des institutions – on a par exemple vu en France le délitement complet du Conseil constitutionnel, ni même l’armée ou la police qui feront tout ce qu’on leur dit de faire, sans beaucoup d’états d’âme.
En revanche, il en va différemment pour chaque individu, tant ceux qui composent les institutions que les forces de l’ordre et tous les citoyens : tous ont besoin de l’assurance, même vaguement inconsciente, qu’ils sont du « bon » côté de l’Histoire, qu’ils sont les « gentils », ceux qui participent à la perpétuation de la société et de la civilisation dans un cadre raisonnable.
Comme je l’expliquais dans un précédent billet, pour garantir la continuité de ce consentement, il faut donc que le théâtre global continue de façon suffisamment satisfaisante sinon, ce consentement s’évapore et la fermeté des institutions disparaît et le gouvernement tombe.
Logiquement, nous sommes donc essentiellement dans une guerre de l’information : d’un côté les médias officiels, la pensée qui a le droit de cité et de l’autre l’ensemble des réseaux sociaux au sens large, depuis les discussions entre membres d’une même famille, au sein des entreprises, dans des restaurants, les bars et les lieux de rencontre traditionnels (dont on ne s’étonnera donc pas que les gouvernements aient tout fait pour les conserver fermés), jusqu’aux réseaux informationnels alternatifs (essentiellement internet).
Comment s’étonner, dès lors, que les seconds soient classifiés dans les terroristes par les premiers ?